Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les Chroniques de Mel
28 mai 2015

L'Enfant de l'étranger d'Alan Hollinghurst

CVT_Lenfant-de-letranger_2503

L'histoire: En 1913, Cecil Valance rend visite à son ami George Sawle et fait ainsi la connaissance de toute sa famille, notamment Daphné, sa jeune soeur. Poète issu d'une famille aristocrate britannique, Cecil sait comment charmer. Fantasque et attachant, il devient la coqueluche des Sawle, puis de l'Angleterre. Tout au long du XXeme siècle, il fascine et attise les curiosités, même après sa mort. 

La construction du roman est très intéressante. Tous les moments clefs de la vie des différents personnages sont passés sous silence et ils sont à peine évoqués dans les passages intermédiaires relatés. L'intrigue se découpe en cinq ou six parties dans lesquelles on suit les pas de Daphné et George, les principaux concernés par Cecil, ou encore Paul Bryant ou Rob, qui ne le connaissent que de nom ou font des recherches sur lui, des décennies après sa mort. Le choix de ne pas éclairer le lecteur sur les nombreux secrets qui entourent les personnages principaux est assez osé. La part de mystère du roman lui permet d'être captivant car il faut formuler soi-même ses hypothèses. Mais cette façon de présenter l'intrigue possède aussi ses limites. Alan Hollinghurst choisit de ne jamais énoncer clairement les choses et L'Enfant de l'étranger se transforme en une succession de non-dits, de rumeurs non vérifiées ou confirmées, d'incertitudes... ce qui devient un peu pénible au bout de 600 ou 700 pages. 

Il y a une autre chose qui m'a gênée ; c'est la façon dont sont traités les personnages. La façon dont le narrateur nous présente le caractère des personnages est totalement biaisée mais le lecteur ne peut pas s'en rendre compte immédiatement. Il est donc assez courant qu'un personnage paraisse sympathique dans l'une des parties avant de devenir un menteur prétentieux dans une autre. Pour être plus claire, je vais prendre l'exemple de Paul Bryant, à qui deux parties sont consacrées. Dans la première, il est un jeune employé de banque un peu empoté, introverti et mal dans sa peau, en lutte avec son homosexualité. Dans la deuxième, quinze ans plus tard, il mène des recherches sur Cecil Valance et cherche à interroger sa famille et ses amis. Il est toujours un peu gauche et timide, et paradoxalement un peu prétentieux mais sans plus. Au cours de ces différents moments, le lecteur se forge une image de lui qui est complètement remise en question par la dernière partie dans laquelle Rob, le nouveau protagoniste principal, entend parler de lui en termes pas toujours flatteurs. Personnellement, je me suis sentie légèrement trahie par le narrateur qui a sciemment choisi de cacher certains aspects de la personnalité de beaucoup de personnages. Je l'ai sans doute déjà dit mais il existe un pacte de lecture dans un roman, c'est à dire un contrat basé sur la confiance entre le narrateur et le lecteur. Dans L'Enfant de l'étranger, le pacte est insidieusement brisé à plusieurs reprises.

Ce qui m'avait attirée quand j'ai acheté ce livre a été l'évocation de l'Angleterre du début du XXème siècle. Pour cela, je dois dire que je n'ai pas été déçue, même quand le roman avançait dans le temps. Les descriptions très détaillées mettent en scène des paysages bucoliques ou les fameux parcs et maisons victoriennes des téléfilms de la BBC... L'atmosphère parfaite pour un roman lourd de secrets dont la majorité tourne autour de Cecil Valance, véritable figure centrale du livre alors qu'il n'est qu'un souvenir, un fantôme ou une présence tout au long de l'histoire. J'aime l'idée qu'une personne puisse vivre à travers la fascination qu'elle exerce sur d'autres, même longtemps après sa disparition. 

Au final, je suis assez mitigée à propos de ce roman. Certains personnages qui m'ont beaucoup plu (comme George) sont sous-exploités, d'autres m'ont paru trop caricaturaux et je me suis sentie flouée sur les derniers (comme Paul ou même Peter qui ne sert finalement pas à grand chose). Le fait que les mystères ne soient jamais vraiment éclaircis est assez agaçant. Rien que le titre, l'Enfant de l'étranger, n'est pas tout à fait expliqué. En fait, j'aime le concept, l'histoire et la majorité des personnages mais pas vraiment le style de l'auteur qui a une tendance au bavardage (dans un roman dans lequel il ne se passe déjà pas grand chose). 

Publicité
Publicité
Commentaires
Les Chroniques de Mel
Publicité
Newsletter
Publicité